[vc_row][vc_column][vc_single_image image=”15786″ img_size=”large” add_caption=”yes”][vc_column_text]Je suis fascinée par l’Afrique du Sud malgré son histoire douloureuse : les atrocités de la colonisation néerlandaise, la ségrégation qui a précédé l’apartheid et la blessure profonde de l’ère de l’apartheid et de ses crimes contre l’humanité. À l’occasion de la Journée de l’enfant africain de cette année, j’ai participé à l’organisation d’un concert dans le village de bord de mer avec un groupe de jeunes Sénégalais appelé Delusiwaat Art et l’école internationale de Popenguine. En ma qualité de coordinatrice du mouvement Africans Rising For Justice, Peace and Dignity, ma participation à l’événement a consisté à informer les jeunes sur le soulèvement de Soweto et le rôle des jeunes dans l’effondrement final du système d’apartheid en Afrique du Sud. J’ai également rencontré la classe d’alphabétisation des femmes du village de Ndayane, qui a organisé une conversation avec les enfants et les parents sur l’importance de l’éducation pour un avenir meilleur. Ce fut une joie de faire connaître les histoires des enfants de Soweto et de mettre en évidence leur combat pour une éducation de qualité dans les zones rurales du Sénégal.

Je suis née et j’ai grandi en Afrique occidentale, où j’ai appris à l’école publique que l’apartheid était un crime contre l’humanité. J’ai eu le privilège de visiter l’Afrique du Sud à plusieurs reprises, notamment à l’occasion de la conférence mondiale sur le racisme et la xénophobie qui s’est tenue à Durban. Je suis bien consciente de la pauvreté endémique qui sévit dans le pays, qui se reflète notamment dans la situation dramatique de la communauté noire, soit plus de quatre-vingts pour cent de la population, qui vit toujours dans une économie dominée par les blancs et les étrangers. Les taux élevés de criminalité et d’attaques xénophobes, ainsi que la violence endémique à l’égard des femmes, me troublent profondément. Pour couronner le tout, le pays est à nouveau fermé à cause de la troisième vague du COVID-19.[/vc_column_text][vc_column_text]Mais j’aime et j’admire l’Afrique du Sud et j’ai un profond respect pour son peuple car c’est un pays qui a été capable de démolir les rouages officiels d’un système injuste comme l’apartheid malgré tous les défis qu’il a affrontés provenant d’une myriade d’intérêts internes et externes déterminés à entraver les mouvements de réforme. Pour les personnes qui se battent pour changer des systèmes qui semblent impossibles à faire bouger, la lutte contre l’apartheid est une source d’inspiration, une preuve que nous pouvons gagner. Elle nous donne de l’espoir alors que nous continuons à nous battre pour la véritable libération de notre continent. L’Afrique du Sud nous rappelle l’importance de notre travail pour arrêter les flux financiers illicites qui saignent notre continent, pour annuler la dette injuste qui nous maintient en esclavage économique et pour rompre les alliances impies de nos gouvernements avec les multinationales qui dépossèdent les Africains de leurs terres et de leurs droits.

La condamnation de l’ancien président Jacob Zuma, ajoutée aux demandes internationales réclamant l’arrestation de la famille Gupta, gangrenée par la corruption, place l’Afrique du Sud parmi les nations qui renforcent avec audace la responsabilité et l’État de droit. Les défenseurs de la justice et les amoureux de la paix du monde entier doivent célébrer cette victoire et soutenir le peuple sud-africain dans sa lutte pour maintenir l’intégrité de son système judiciaire. Bien que M. Zuma soit enfin confronté à la justice pour son abus de pouvoir, le monde ne doit pas oublier qu’il n’a jamais été poursuivi pour les accusations portées contre lui par Fezekile Ntsukela Kuzwayo, une femme qui l’a accusé de viol en 2005 alors qu’il était président de l’ANC. Le président Zuma a été acquitté en 2006 après qu’un juge ait décidé que leur rencontre était consensuelle. Je ne cesse de me demander si, si la voix des femmes était réellement entendue, Zuma aurait-il eu l’occasion de faire un mauvais usage des ressources de l’État sud-africain ?[/vc_column_text][vc_column_text]A l’occasion de la Journée internationale de la femme (8 mars), Africans Rising a organisé cette année une journée de réflexion virtuelle en solidarité avec le peuple sénégalais. Nous avons échangé avec des femmes qui faisaient face à la réalité actuelle de la vie au Sénégal. Il y’avait de la violence dans les rues et des manifestations contre l’arrestation de Mr Ousmane Sonko, membre de l’opposition, accusé de viol par une jeune femme. Des membres des mouvements féministes du pays utilisaient tous leurs pouvoirs et leurs relations pour faire en sorte que ces protestations restent pacifiques, tout en soutenant les demandes de la jeune femme pour que Sonko reste en prison pendant qu’une enquête se déroule et clarifie ce qui s’est réellement passé. Lors de notre rencontre virtuelle, je me souviens clairement de la voix de la féministe Nancy Kachingwe, qui nous a conseillé de tirer les leçons de l’expérience de l’Afrique du Sud avec Jacob Zuma en disant qu’un homme qui a violé des femmes ne devrait pas avoir la possibilité d’abuser de toute la population en tant que président. 

Il est évident que nous n’avons pas retenu cette leçon en 2005, mais il n’est pas trop tard pour commencer maintenant. Peut-être que si Zuma était condamné, nous entrerions dans une nouvelle ère où les dirigeants politiques qui ont abusé de notre peuple ou volé nos ressources seraient enfin confrontés à des conséquences juridiques. Peut-être l’Afrique du Sud est-elle en train de briser le moule de l’acceptation à contrecœur des méfaits de nos dirigeants. La question est maintenant de savoir qui suivra leur exemple.[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]